La Horde du Contrevent d’Alain Damasio

Hello les bouquineurs de passage !

horde du contrevent alain damasioJe ne pouvais pas terminer cette année sans vous parler de l’un de mes coups de cœur de 2018 !

Pourtant, çà avait mal commencé entre ce livre et moi : Un volume trop gros, une couv un peu mochouille, une intrigue qui semblait complexe, rien qui m’emballait… et pourtant ! 

Après une n-ième hésitation à la bibliothèque et devant les multiples recommandations des fans de dystopie, j’ai cédé.
Et quelle bonne idée ! 

Avouons-le, il faut s’accrocher dans les 30 premières pages : l’univers est singulier et le style volontairement très déroutant.
Il faut faire fi de l’apparente difficulté à entrer dans le texte car tout se décante au fur et à mesure, pour être ensuite rapidement pris dans l’intrigue et ses nombreux rebondissements. 

Plonger dans ce roman, c’est d’abord intégrer la horde et ses 23 membres, tous plus insolites les uns que les autres.
Chacun dispose d’une fonction indispensable à la vie de la horde, de l’éclaireur à la soigneuse, en passant au combattant-protecteur et au scribe.

Par l’habile parti pris de l’auteur, on entre, tour à tour, dans la peau de chacun de ces hordiers ! Et c’est là toute l’originalité de ton du roman : l’aventure avance à travers les yeux, et surtout le langage de chaque personnage, parfois brutal et grossier chez Golgoth le Traceur, poétique et dansant chez Caracole le Troubadour, ou encore plus factuel chez Sov le Scribe.

Qu’en dit la 4ème de couv (pompée sur Babelio) ?

Un groupe d’élite, formé dès l’enfance à faire face, part des confins d’une terre féroce, saignée de rafales, pour aller chercher l’origine du vent. Ils sont vingt-trois, un bloc, un nœud de courage : la Horde. Ils sont pilier, ailier, traceur, aéromètre et géomètre, feuleuse et sourcière, troubadour et scribe. Ils traversent leur monde debout, à pied, en quête d’un Extrême-Amont qui fuit devant eux comme un horizon fou. 

Expérience de lecture unique, La Horde du Contrevent est un livre-univers qui fond d’un même feu l’aventure et la poésie des parcours, le combat nu et la quête d’un sens profond du vivant qui unirait le mouvement et le lien. Chaque mot résonne, claque, fuse : Alain Damasio joue de sa plume comme d’un pinceau, d’une caméra ou d’une arme…
Chef-d’œuvre porté par un bouche-à-oreille rare, le roman a été logiquement récompensé par le Grand Prix de l’Imaginaire.

La horde doit parcourir la terre pour découvrir l’origine du vent. Dans une quête à la fois collective et individuelle, guidée par son téméraire et intraitable meneur Golgoth, elle devra rester unie face à l’adversité, frôlée en permanence par la mort, où la nature se fait toujours plus hostile. 

Au final, on s’attache aux personnages, à cette horde compacte, loyale, unie.
On est pris dans son quotidien et on a envie de baisser la tête, de prendre ses appuis et de pousser avec eux sous le vent.

L’une des forces de ce livre réside avant tout dans sa grande qualité d’écriture et son maniement admirable de la langue française qui plaira aux amoureux des mots.

C’est ensuite une histoire construite, pleine de rebondissements mais tenue jusqu’à la dernière ligne. Çà fait du bien un roman de science fiction qui ne finit pas en eau en boudin !

Vibrant, ardent, exigent, vous l’avez compris, j’ai été transportée et enchantée par ce livre.

Donc, pour résumer :

  • si vous aimez la SF, saupoudrée d’une pincée de fantasy
  • Si vous ne craignez pas d’être dérouté.e et emporté.e dans un univers unique, ni de ployer sous une multitude de termes techniques
  • Si vous êtes un.e amoureux.se de la langue française
  • Si vous recherchez de l’aventure et que 710 pages ne vous font pas peur

alors ce livre est fait pour vous !

Sachez qu’il a été adapté en BD chez les éditions Delcourt.
Si l’univers graphique a l’air top, je ne l’ai pas encore lue, de peur de perdre ma propre vision des hordiers, notamment celle de Golgoth ou Caracole.

Et vous avez-vous eu l’occasion de le lire en roman ou encore en BD ?

Catégorie : 5 étoiles

La papeterie Tsubaki de Ito Ogawa

Hello les bouquineurs !

Envie d’un peu de tendresse dans ce monde de brutes ?
De beauté et de douceur mais sans mièvreries ?

Plongez-vous sans tarder dans La papeterie Tsubaki, dépaysement et apaisement garantis.

Petit résumé de la 4ème de couverture

« Hatoko a vingt-cinq ans et la voici de retour à Kamakura, dans la petite papeterie que lui a léguée sa grand-mère. Le moment est venu pour elle de faire ses premiers pas comme écrivain public, car cette grand-mère, une femme exigeante et sévère, lui a enseigné l’art difficile d’écrire pour les autres.
Le choix des mots, mais aussi la calligraphie, le papier, l’encre, l’enveloppe, le timbre, tout est important dans une lettre. Hatoko répond aux souhaits même les plus surprenants de ceux qui viennent la voir : elle calligraphie des cartes de vœux, rédige un mot de condoléances pour le décès d’un singe, des lettres d’adieu aussi bien que d’amour. A toutes les exigences elle se plie avec bonheur, pour résoudre un conflit, apaiser un chagrin.
Et c’est ainsi que, grâce à son talent, la papeterie Tsubaki devient bientôt un lieu de partage avec les autres et le théâtre de réconciliations inattendues. »

J’avoue avoir eu du mal à m’accommoder au rythme des toutes premières pages. Mais il faut dire que je sortais tout juste des 600 pages de La vérité sur l’affaire Harry Quebert de Joël Dicker, véritable « page-turner » trépidant.

Il m’a bien fallu laisser passer 2,3 jours avant de reprendre La papeterie Tsubaki, pour réussir à décélérer et enfin me laisser porter par la tranquillité de son tempo. 

Un rythme lent donc, à la limite de la contemplation, qui force à la déconnexion de notre propre quotidien.

Pendant une année, au fil des saisons, Hatoko, narratrice, nous dépeint sa vie d’écrivain public. Entre tâches domestiques et interactions avec sa voisine, Hatoko découvre son nouveau métier, enseigné avec rigueur depuis sa plus tendre enfance par sa grand-mère, l’Aînée.

D’abord subie, cette situation va lui permettre de s’ouvrir aux contacts des autres, clients et voisinage, tout en se découvrant elle-même.

Ce roman est une jolie déclaration d’amour au métier d’écrivain public, à l’importance de l’écrit et à la beauté de la calligraphie.
Forte de cette envie de partager cet art, l’autrice a parsemé de nombreuses inclusions avec les visuels des lettres réalisées par Hatoko.  

Parce qu’elle goûte aux plaisirs d’un thé fumant préparé avec soin, s’émeut du cycle de floraison des fleurs ou de la beauté d’un paysage, Hatoko, à travers ses sorties et ses méditations dans les temples, prend le temps de vivre et nous donne envie, à nous aussi, de ralentir.

Un livre d’une douceur et d’une sagesse imparable mais qui ne se veut pas niais. Il offre en effet une bien jolie galerie de personnages, sans manichéisme, chacun(e) portant en soi sa part d’ombres et de regrets.

Prenez le temps de goûter à la douceur de vivre…
Un livre qui se déguste page après page.

Catégorie : 5*

Les délices de Tokyo de Naomi Kawase [Film]

delices-tokyoHello les bouquineurs de passage,

Tentons d’insuffler un peu de vie à ce blog en complète perdition et une fois n’est pas coutume, parlons cinéma (Tchi tcha !).

L’édition 2018 du Festival de Cannes a débuté la semaine passée et à cette occasion, Arte diffuse de nombreux films primés, dont ce bien joli film : Les délices de Tokyo de Naomi Kawase.

 

Petit point résumé :

Sentarô tient une petite échoppe de dorayakis, pâtisserie japonaise faite de 2 pancakes garnis de pâte de haricots rouges. Taciturne, Sentarô exerce son métier non sans une certaine monotonie. Un jour, il fait la connaissance de Tokuê, une femme quelque peu âgée qui répond à son offre d’emploi d’aide en cuisine. Gêné par son âge avancé, Sentarô lui refuse d’abord le poste. Mais mis devant les talents exceptionnels de cette cuisinière hors-pair, il finira par l’engager.
Entre ces 2 passionnés de cuisine va dès lors se tisser un véritable lien d’amitié sous l’œil complice de Wakana, une jeune collégienne esseulée. 

Mon avis ? Ce film est un véritable coup de cœur.
En relatant le quotidien de ces 3 personnages dans le Tokyo d’aujourd’hui, la réalisatrice dépeint tout en nuances la société japonaise actuelle et dénonce les différentes formes d’exclusion dont sont victimes Sentarô, Tokuê et Wakana.

Une histoire de transmission intergénérationnelle mais aussi une réflexion sur le poids du passé qui imposent nos « choix » de vies.

Les 3 personnages sont touchants et attachants, on se prend d’affection pour eux et on a envie de se glisser avec eux, dans la petite boutique baignant dans l’odeur des dorayakis.

Adapté du roman éponyme de Durian Sukegawa, que je n’ai pas encore eu l’occasion de lire, Les délices de Tokyo est un film plein de grâce, une ôde à la tolérance et une exhortation à rester soi-même et à suivre sa propre voie.

Un vrai petit bijou d’humanité et de sensibilité que je ne saurai trop vous recommander en ces temps de repli sur soi et de peur de l’autre.

N’hésitez pas à le (re)voir ce soir sur Arte ou dès à présent (gratuitement !!) sur leur site, jusqu’au 20 mai !

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